dimanche 10 mai 2009

CR réunion CNU/Ministère‏

Compte rendu de la rencontre du 29 avril 2009 entre le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche et la délégation constituée par six porte-parole de la Coordination Nationale des Universités


Rappel des circonstances : Cette rencontre a été obtenue grâce à l’initiative d’une vingtaine d’enseignants-chercheurs qui ont occupé, ce jour-là, la cour du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de Recherche et demandé à ce que des représentants de la CNU soient reçus. Il a fallu l’intervention des CRS et de longues tractations pour que le directeur de cabinet de V. Pécresse accepte de recevoir les six porte-parole. En échange de ce « geste » du ministère, les EC qui occupaient les lieux ont accepté de sortir de la cour dans le calme.


Interlocuteurs : Philippe Gilet, directeur de cabinet de V. Pécresse et Dominique Marchand, directrice adjointe de cabinet.


- Nous avons rappelé les revendications de la CNU (décrets, masterisation et abrogation de la LRU comme cadre législatif de ces décrets)


- En réponse, nos interlocuteurs ont dit qu'il "n'y avait pas de dessein à démanteler l'université". La discussion a surtout porté sur les personnels et les suppressions de postes. Selon le Ministère, les 900 suppressions de postes programmées en 2009 ne sont en fait pas des suppressions car elles sont toutes compensées. A titre d'exemple, 225 emplois sont restitués dans la masse salariale de 2009 (45 000 euros). De la même manière 130 supports sont payés par dotation de l'Etat (chaires d'excellences).


Au final la politique du gouvernement n’a, selon eux, aucun impact sur le recrutement : il y aura le même nombre de recrutement et le bilan (après calculs savants et divers écrans de fumées) est positif : 85 postes d’EC en plus pour cette année.


- Sur la question des doctorants, le gouvernement avoue qu'il n’a rien prévu pour les doctorants non financés mais que, par contre, les ATER et les couvertures de moniteurs se voient revalorisés (2500 couvertures en plus, augmentation de 16% des allocations en deux ans).


- Lorsque nous posions des questions gênantes, notamment sur les budgets des universités (baisse du budget réel après calcul des nouvelles dépenses occasionnées par le désengagement de l'Etat et l'inflation), nous avons été renvoyé à des exemples locaux. L'exemple le plus frappant est la discussion sur le budget de l'université du Havre (texto envoyé à une secrétaire par le directeur du cabinet, secrétaire qui arrive 5 minutes après avec le budget précis du Havre). Chiffres à l'appui, le directeur de cabinet a expliqué que 1,8 millions d'euros pour la mise en sécurité des locaux, ce n'est pas "pas d'argent du tout". Après avoir expliqué qu'il était normal d'assurer la sécurité des locaux, la discussion n'est pas allée plus loin.


- Nous avons demandé une garantie de la non augmentation des frais d'inscriptions pour les étudiants. Ils le garantissent, enfin pour l'instant (précisant tout de même qu’il leur était impossible de donner des garanties au-delà d’une année puisque « les frais d’inscription sont votés chaque année par le Parlement »).


- Pour les personnels non enseignants, cette année est selon le cabinet de V Pécresse "un plan de promotion exceptionnel pour les BIATOSS". Toutes les catégories C pourront passer plus facilement en catégorie B, tandis que les étudiants pourront faire du monitorat pour remplacer les promus (mais aussi tous les postes manquant en vue de combler le sous-effectif chronique par le monitorat étudiant). A notre indignation devant le fait que l'on prenne les étudiants pour faire du travail qualifié (de catégorie C, ou parfois même de catégorie B) au SMIC, il nous a été répondu que si nous ne voulions pas des 100 000 heures de monitorat offerts par le Ministère, d'autres étudiants seraient bien contents d'avoir ce travail (« Nous préférons voir les étudiants travailler là où ils étudient plutôt que chez MacDonald.... »)


- Il nous a été rappelé qu'il est inutile d'envahir ou d'occuper le Ministère pour être reçu en délégation, mais qu'il suffisait d'envoyer une lettre pour être facilement reçu (Secrétariat du ministère : secretariat.marchand@recherche.gouv.fr).


- Sur la question de la presse et des déclarations de V. Pécresse dans le Parisien ("le mouvement ne tient que du fait de bandes encagoulées", référence aux bandes de Strasbourg...), il a été dit que "c'est nous" qui avions commencé (agression à la poubelle renversée du président de l'université de Brest à la terrasse d'un café) et qu'il fallait arrêter avec la désinformation.


- Concernant le décret modifiant le statut des enseignants-chercheurs, le Ministère se félicite d’avoir introduit la notion d’évaluation tous les quatre ans (« Vous ne pouvez tout de même pas être contre l’évaluation par vos pairs »). A la question de savoir si les heures supplémentaires au-delà de 192h seront payées dans le cas où l’enseignant-chercheur aurait une recherche « non reconnue comme telle par le CNU », il a été répondu : « Cela se décidera dans chaque université ».


- Lorsque nous avons évoqué les différences de vision qui nous séparaient (« vision économique, budgétaire et comptable » face à une « vision d’une recherche libre guidée par la motivation du chercheur »), nos interlocuteurs ont répondu par des questions visant à détourner le sujet (« qu’entendez-vous par une recherche libre ? »).


- Quand nous avons demandé comment des enseignants-chercheurs dont le service aurait été modulé pourraient se remettre à la recherche, on nous a répondu que les CRCT seraient là pour pallier cela dans chaque université.


- Quand nous avons demandé comment serait prise en compte la recherche d’un enseignant qui, pendant 4 ans, aurait choisi de lire pour enrichir ses connaissances plutôt que d’écrire des articles, nos interlocuteurs ont fait mine de ne pas comprendre la question ou n’y avaient même pas réfléchi : « Qu’entendez-vous par ‘seulement lire’ ? ».


- En ce qui concerne la mastérisation, nos interlocuteurs ont souligné que le syndicat majoritaire (FSU) participait aux groupes de travail et était donc en faveur de ce processus.


- Lorsque nous avons évoqué le problème crucial du lien entre concours, disciplines et recherche (notamment pour les lettres et sciences humaines), on nous a conseillé de contacter la commission Marois-Filâtre pour exprimer nos doléances.



CONCLUSION : cette réunion a vu s'affronter deux visions et deux analyses clairement contradictoires et diamétralement opposées des réformes. Le Ministère a tenté de nous prouver sa bonne action pour l'université française en citant beaucoup de chiffres, en faisant des calculs savants qui amènent à la conclusion que personne ne supprime des postes mais qu'au contraire le gouvernement en crée... Il faut absolument que lors d'une prochaine rencontre (cette fois-ci non improvisée), les porte-parole soient mieux préparés pour répondre à des argumentaires technocratiques et bureaucratiques qui ne visent qu'à démontrer par des chiffres sortis du chapeau que nous ne comprenons pas les réformes. Il semblerait d'après le Ministère que si nous faisons grève, c'est que nous ne comprenons pas les réformes et qu'il faut lire les textes.

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